La France n’a plus depuis longtemps de politique arabe. Et pour cause, elle n’a plus comme seul axe diplomatique que de prêcher la démocratie et les droits de l’homme. Ligne droite estime en conséquence nécessaire de redonner à la diplomatie française dans cette partie du monde quelques axes politiques forts.
Mettre un terme à la diplomatie moralisatrice
L’obsession moralisatrice de la politique étrangère de la France est en effet particulièrement prononcée dans le monde arabe où elle a déjà conduit à plusieurs désastres humanitaires et politiques. Ainsi, est-ce le cas de la Libye et de la Syrie où nos gouvernants, loin d’agir dans l’intérêt de notre pays, se sont focalisés sur le non-respect des principes humanitaires. En Syrie, par exemple, au lieu de soutenir les ennemis de ses ennemis, la France, comme les autres pays occidentaux, a mené une politique ambiguë qui a objectivement servi le groupe islamique Daesh. Parce que le régime de Bachar el-Assad n’est pas un régime démocratique, la France a de façon naïve et artificielle soutenu une opposition qualifiée de démocratique mais fort peu représentative, allant jusqu’à livrer à des groupes islamiques prétendument modérés des armes qui finissaient entre les mains des ennemis de la France.
Choisir son camp
Aussi faut-il à ce stade en revenir à un principe simple et clair. Dans un conflit armé, il faut choisir son camp ou jouer les arbitres. Mais les positons alambiquées en faveur d’une tierce partie évanescente peuvent certes satisfaire des diplomates préoccupés de discours bien balancés ou des journalistes obnubilés par le politiquement correct, mais elles n’ont aucune portée auprès des belligérants et ne peuvent en aucune façon infléchir l’issue du conflit. La diplomatie ne doit pas être déterminée par des impératifs de communication sur la scène médiatique nationale mais par les exigences de la défense de nos intérêts sur la scène mondiale.
Privilégier les régimes laïcs respectueux des droits des chrétiens
Il est important par ailleurs de prendre en compte la réalité du monde islamique qui, à l’évidence, n’est pas fait pour la démocratie. L’observation pragmatique des pays concernés ne peut que confirmer ce constat qui va d’ailleurs de pair avec la nature de la religion musulmane, laquelle n’est guère compatible avec les principes de souveraineté populaire.
Dans ces conditions, il n’est, à vrai dire, que deux options viables aujourd’hui dans cette partie du monde : soit un régime autoritaire tenu par un homme fort soutenu par l’armée, soit un régime islamiste, tout aussi dictatorial, sinon plus. Le cas de l’Égypte du printemps arabe a été à cet égard plein d’enseignements. Car, lorsque le régime autoritaire du président Moubarak a été renversé, la démocratie balbutiante qui s’est mise en place a été aussitôt menacée par un parti islamiste qui s’est très vite imposé, avant d’être finalement écarté à son tour par l’armée et son homme fort, le maréchal Al-Sissi.
La démocratie n’est donc pas une option dans le monde arabe où les possibilités se limitent la plupart du temps à une dictature laïque ou une dictature islamique. Aussi la diplomatie française doit-elle faire le choix des régimes autoritaires laïcs qui peuvent nouer avec l’Europe des liens de coopération amicaux et qui préservent de surcroît la liberté de culte, notamment celle des chrétiens dans leur pays. À cet égard, la France devrait s’engager clairement dans la protection des Lieux saints et la défense des chrétiens d’Orient. Pour ce faire, il lui faut prendre en compte cette exigence de civilisation comme l’un des paramètres principaux de son action diplomatique au Moyen-Orient.
Lever l’hypocrisie des pays qui soutiennent le terrorisme
S’agissant par ailleurs des pays durablement installés dans l’islamisme, comme l’Arabie saoudite ou le Qatar, la position de la France doit être conditionnée par leur attitude face au terrorisme islamique. Il faut en finir avec l’hypocrisie qui conduit les Occidentaux à fermer les yeux sur le soutien occulte accordé par ces pays aux mouvements terroristes et conditionner la poursuite de nos bonnes relations aux garanties qui peuvent être fournies à cet égard. Une attitude exigeante qui aurait du poids si elle était relayée par l’Europe toute entière, voire par l’Occident dans son ensemble. En tout cas, la mise en application de ce principe devrait conduire la France à marquer une pause dans ses relations avec le Qatar.
Encourager la diversité du monde arabe
Dans le même esprit, la France devrait chercher à réduire sa dépendance pétrolière à l’égard des pays du Golfe et singulièrement de l’Arabie saoudite. À cette fin, elle doit s’efforcer de réduire massivement sa consommation de pétrole et diversifier davantage ses sources d’approvisionnement. Elle doit aussi, avec les autres pays européens, exiger que ses contrats pétroliers puissent dorénavant être signés en euros.
En outre, la diplomatie française devrait, quand elle en a la possibilité, chercher à réduire la suprématie sunnite au besoin en favorisant plutôt la composante chiite. Il s’agirait plus globalement d’œuvrer à la multipolarité au sein du monde arabe. Une configuration qui pourrait atténuer la pression de ce dernier sur l’Europe et renforcer l’influence des Européens dans cette partie du monde.
Normaliser les relations avec les pays du Maghreb
Pour ce qui est des relations de la France avec les États du Maghreb, les pays musulmans les plus liés géographiquement et historiquement à notre pays, elles doivent être maintenant normalisées, tout particulièrement avec l’Algérie. Il convient notamment de mettre un terme définitif à la repentance et de nouer des relations diplomatiques de pays souverain à pays souverain, libérées de toute dimension affective. Ces relations doivent de plus être rééquilibrées et fondées sur le principe de la réciprocité : la France peut continuer à aider généreusement les trois pays du Maghreb à se développer à condition que ceux-ci aident en retour la France à maîtriser l’immigration et notamment à tarir les flux d’immigrés clandestins et à faciliter les procédures d’expulsion en acceptant sans barguigner le retour de leurs ressortissants expulsés de France.
Construire un réseau d’alliances
Enfin, le monde musulman étant de tous les grands ensembles civilisationnels du monde multipolaire le plus proche de la France et de l’Europe, il importe de tisser avec les pays qui le composent des relations aussi apaisées que possible faites de respect mutuel. Dans cet esprit, la France devrait construire un réseau d’alliances avec les pays les plus fiables et les plus stables de la région, comme le Maroc par exemple.
Gageons qu’une nouvelle politique arabe fondée d’une part sur le respect des nations et le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes et, d’autre part, sur l’affirmation sans complexe et sans repentance de positions claires, permettrait à notre pays de jouer dans cette partie du monde un rôle plus constructif et plus conforme à ses intérêts.
Crédit photo : Paule Knete via Pixabay